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table, par une exposition abrégée des découvertes du Chevalier Newton, sur la matière dont il est question.

Commençons donc d’abord par ce qu’il y a de plus simple et de plus à notre portée : jetons les yeux sur notre globe, et voyons quelle est la nature de la gravité dans les Corps sublunaires ; afin d’être plus assurés dans nos recherches, lorsque nous en serons aux Corps célestes qui se trouveront si éloignés de notre habitation. Tous les Philosophes sont d’accord pour admettre une gravitation générale de tous les Corps vers notre globe. On est convaincu par un grand nombre d’expériences, qu’il n’y a pas de Corps vraiment léger. Ce que l’on appelle légèreté n’est qu’une propriété relative et apparente ; ce n’est pas une légèreté absolue et véritable ; on sait qu’elle dépend d’une gravité plus puissante des Corps environnants.

Cela posé, puisque les Corps gravitent vers la terre, il faut aussi que la terre gravite également vers les Corps ; car il est aisé de prouver, comme on va le faire tout à l’heure, que l’action de la gravité est égale et réciproque. Imaginons la masse de la terre partagée en deux parties quelconques, égales ou inégales. Si les efforts ou les poids de chaque partie d’une vers l’autre n’étaient pas égaux, la plus faible céderait nécessairement à la plus forte, et les deux parties ainsi unies continueraient de se mouvoir à l’infini vers le point du ciel opposé à la direction de la plus pesante ; ce qui est absolument contraire à l’expérience ; il faut donc dire que les poids des parties sont dans un parfait équilibre, c’est-à-dire, que l’action de la gravité est égale et réciproque.

Les poids des corps également éloignés du centre de la terre sont comme les quantités de matière qu’ils renferment. C’est une suite nécessaire de l’égalité d’accélération des corps qui tombent par la seule force de leur pesanteur ; car il est évident que des forces qui impriment à des corps inégaux des degrés égaux de vitesse, doivent être proportionnelles à la quantité de matière qu’il faut mettre en mouvement. D’ailleurs on est maintenant assuré que tous les corps reçoivent une égale accélération ; puisque, dans le vide de Boile, ils décrivent tous des espaces égaux en temps égaux ; n’étant plus différemment arrêtés par la résistance de l’air. La même vérité est encore prouvée avec plus d’exactitude par l’expérience des pendules.

Les forces attractives[1] des corps à diſtances égales ſont comme

les quantités de matiére contenues dans ces mêmes corps. Car puiſ-

  1. On remarquera ici que M. Côtes emploie le mot de force attractive pour exprimer la pesanteur, comme a fait M. Newton. En général, toutes ces expressions, force attractive, attraction, gravité, gravitation, pesanteur, ne signifient rien autre chose que cette tendance de tous les corps vers un centre commun de pesanteur, soit que cette tendance qui produit réellement une force, soit occasionnée dans les corps par un mécanisme que nous ignorons ; soit que plutôt elle soit une propriété continuellement imprimée à la matière par un pur effet de la volonté du Créateur, qui veut produire par-là tous les Phénomènes dont nous sommes témoins. Il ne s’agit ici que du fait ; les noms sont ici indifférents et présenteraient tous les mêmes difficultés pour quiconque n’entrevoit pas bien dans l’esprit de l’Auteur. Voyez à ce ſujet le Chapitre II. des discours de M. de Maupertuis, sur la Fig. des Astres, pag. 16 de la nouvelle édition . On ne peut rien de plus lumineux que cet excellent morceau, qui eſt une diſcuſſion (vraiment) métaphiſyque ſur l’attraction, comme ſon titre l’annonce.