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meuble… Bien, la main… Très bien… Ne la bouge plus… Le corps bien droit, la tête un peu inclinée… Non !… De l’autre côté… Encore un peu… C’est ça… De la fierté, de la grâce… Bon, ça va bien… Tu tiens la pose ?… Je commence.

LOLOTTE. — On peut causer ?

MOLESQUIN. — Ça ne me dérange pas. Jabotte, mais ne bouge plus.

LOLOTTE. — Compris… Qui c’est, que j’représente ?

MOLESQUIN. — Marie-Antoinette.

LOLOTTE. — Oh la la !… Elle n’avait pas même de nom d’famille… Mince de grue, alors !

MOLESQUIN. — Mais non, c’était une reine.

LOLOTTE. — Une pour de vrai, ou une des lavoirs ?

MOLESQUIN. — Une pour de vrai.

LOLOTTE. — C’est rien rigolo !… V’la que j’fais la reine, à présent !… On en fait d’drôles, de métiers, pour gagner sa vie !… Pourquoi qu’elle était reine ?

MOLESQUIN. — Parce qu’elle avait épousé un roi.

LOLOTTE. — C’est bien malin !… J’en f’rais tout autant, à l’occasion, et mieux qu’elle, p’t’être bien !… Qui c’était, le roi qu’elle avait levé ?… Attends, j’sais bien !… C’était Henri IV, celui qu’est su’l’Pont-Neuf !

MOLESQUIN. — Tu en es sûre ?

LOLOTTE. — C’te malice !… Y’a pas b’soin d’avoir appris la chose… l’astronomie, pour voir que les deux costumes sont assortis, celui du Pont-Neuf et çui-ci… J’suis bien trop intelligente pour ne pas avoir senti ça tout de suite.

MOLESQUIN. — Tu m’en diras tant…

LOLOTTE. — Ça m’aurait botté, à moi, d’être reine… On fréquente des gens d’la haute… des ambas-