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Page:Ista - Håre èt hote, 72 contes en 12 fascicules, No 11, 1917.djvu/21

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voilà qu’ je vois par terre un tapis qu’ c’était la peau d’un ours, avec une tête, des yeux, des dents èt tout…

« Je leur vais faire une bonne blaque », dis-che moi ainsi… Je m’ mets à quate pattes, je chausse la peau d’ l’ours sur mon dos, avec la tête sur ma tête, èt je rente dans l’ colidor jusse au moment qu’ les deux autes descendaient un terripe coronisse de garderope qui pesait bien autour de septante ou quatre-vingt kulos…

J’arrife… Ecoutez bien, si c’ n’est pas tout pareil qu’à l’Espôsition d’ Gand… Is m’ voient tout d’un coup, èt, comme i n’ faisait pas fort clair dans l’ colidor, is m’ prennent pour une bête pour le bon, ça fait qu’ voilà Doné qui crîye :

Tchèssans-lî l’ coronisse so s’ gueûye, ou nos èstans rostis !

Et voilà qu’is me l’ chassent tout comme il avait dit, d’en haut des escaliers où-w-est-ce qu’is étaient. Je m’ sens tout d’un coup raplati comme une fique, avec mon nez qui saignait sur les froitès pierres du colidor, puis j’entends les deux autes qui vannent en voie en r’fermant la porte à la clef… Et j’ai resté là en d’ssous encore plusse qu’une demi-heure, tenez moi, vu que l’coronisse s’avait si bien emmanché sur mon cadâfe que je n’ poulais plus bouger d’une patte !

À la fin des fins, j’entends qu’on droûfe la porte tout doûc’ment, je risque un œil en d’ssous du coronisse, èt je vois bel èt bien l’ garte champète avec deux gendarmes, qu’allaient m’envoyer des coups d’ fusil… Mais is n’ont pas tiré, sa-vous, pasqu’is ont bien pensé qu’un ours pour le bon n’aurait pas pu jurer des noms di Hu aussi fort que ch’ l’ai fait…

Is ont don f’nu prente le coronisse en bas d’ moi, puis on s’a disputé, puis l’ maîte da Doné est f’nu voir comment que l’ dèmènach’ment marchait, èt i m’a flanqué à la porte avec un coup d’ pied dans mon