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Page:Ista - Par un beau dimanche, 1921.djvu/128

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par un beau dimanche

ou en lui tournant le dos. Une jonchée de fougères sèches, sur laquelle traînaient deux ou trois sacs en lambeaux, représentait sans doute le lit. Une vieille caisse d’emballage tenait lieu, tout à la fois, d’armoire à glace, de commode, de canapé et de coffre-fort. Dans les fentes du roc, quelques bouts de bois auxquels pendaient des bottes de plantes séchées. Au dessus de quatre grosses pierres qui formaient foyer, et entre lesquelles se mourait un feu de bois, une grande tôle toute mangée de rouille, toute criblée de trous, et roulée à la va-comme-je-te-pousse, en forme de hotte, conduisait une minime partie de la fumée vers un tuyau qui se perdait en on ne sait quelles profondeurs. Le jour entrait, faiblement, par une fissure latérale, qu’un antique fragment de bâche, pendu à côté, fermait sans doute pendant les grands froids. Sur la roche formant table, il y avait un gros quignon de pain, une tasse ébréchée et un grand couteau, très luisant et très effilé.

À l’entrée du docteur, un être bizarre se leva soudain du coin du feu où il se tenait accroupi, surveillant des pommes de terre qui cuisaient sous la cendre. De petite taille, mais fortement râblé, il était vêtu d’une blouse déteinte et d’un pantalon en lambeaux, mais chaussé de bons gros souliers presque neufs. Sur un torse athlétique, il portait une singulière petite tête, où le visage tout menu, un vrai visage d’enfant, s’effilait sous la vaste protubérance d’un front énorme, disproportionné, posé en encorbellement sur deux orbites profondes, où luisait un sombre regard, ardent et fixe. Une abondante tignasse, noire et crépue comme celle d’un nègre, lui donnait l’air, au premier abord, d’être coiffé d’un colback un peu court.

D’une voix forte et lente, comme font les gardiens qui promènent des étrangers dans la crypte