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Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/139

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Kyra poussa la folie jusqu’à lui demander de visiter son voilier. C’était ce qu’il voulait ; mais l’homme était sûr de sa proie, et il répondit en un turc d’une pureté exquise :

« Pas tout de suite, charmante mademoiselle ! Mon voilier est accosté, de l’autre côté du fleuve, sur le bras du Macin, où il est en train de charger ; et comme vous n’êtes pas habituée aux remous, vous pourriez avoir mal. Mais je satisferai votre curiosité prochainement… En attendant, je suis heureux de tenir ma chaloupe à votre disposition, et je serai honoré de vous voir en faire usage. »

Disant cela, il nous salua d’un gros salamalec qui fit onduler ses vêtements de soie, porta ses mains au front, aux lèvres et à la poitrine, et monta dans le canot.

Ce nouveau plaisir nous fit oublier mère, père, oncles, moussafirs et Dieu lui-même. Nous nous livrâmes corps et âme à la griffe de notre gentilhomme. Trois jours de suite, nous continuâmes à nous balader sur le Danube, nous hasardant de plus en plus loin ; puis, un jour, le canot s’éloigna si