Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/189

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

qui ne visite que les cœurs immortels, quelle que soit la douleur qui les saccage. Mais je me gardai bien de trahir mon amitié avec Loup. Pour que la trahison ne vînt imprudemment de sa part, je l’avais dressé à comprendre qu’il n’y avait rien à manger quand les fenêtres étaient fermées. Il avait si bien compris, que, plus tard, les voyant fermées, il faisait demi-tour de loin et partait. Également, dans nos entretiens, quand je lui disais : « Va, mon ami, maintenant, va !… Et viens demain me voir », il partait aussitôt que je fermais la croisée ; il s’en allait dignement, amicalement, sans se vexer.

Je recevais Moustapha-bey, ainsi que ses domestiques, à des heures régulières, pour me visiter ou me servir. Vu mon état de nervosité, ces réceptions étaient brèves. La présence du bey, tout particulièrement, me mettait hors de moi, et à peine entré, il se sauvait au diable. Son appartement était contigu au mien, mais un grand fumoir nous séparait. Pour plus de sûreté, je fermais ma chambre à clef.

Avec la joie que m’apporta Loup, mon humeur changea. Je devins plus conciliant. Le bey y répondit en me comblant de faveurs. Ainsi, j’eus la permission de me promener tous les jours dans le parc, accom-