« Voulez-vous prendre le café avec moi ? » dis-je à l’inconnu.
En bas, nous causâmes, aspirant nos tschibouks comme des cheminées. Et lui, le premier, me raconta ses peines : sans travail, sans argent, endetté. Alors, je lui dis que moi aussi j’avais un chagrin :
« J’ai perdu mes papiers. Si vous savez comment je pourrais m’en procurer d’autres, je vous donnerai une livre turque pour la commission. »
Il s’alluma :
« Oui, cela se peut ! » fit-il tout bas. « Il y a ici un « écrivain public » qui en procure, mais il demande beaucoup d’argent.
— Combien ? » m’écriai-je, heureux.
« Quatre livres.
— Je les donne ! Et à vous, la livre promise ! »
Une heure plus tard, un scribe à grosse barbe blanche jura sur ses yeux, devant un fonctionnaire, qu’il m’avait vu naître à Stamboul, l’an tel de l’Hégire, que je m’appelais Stavro, que j’étais donc « raïa, sujet soumis du Sultan, notre maître ».
Le fonctionnaire écouta, en souriant ; puis, prenant une plume, couvrit un long papier d’une belle écriture arabe, signa, fit signer le vieux, y appliqua le sceau