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Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/228

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Le lit commun, une longue rangée de planches nues, occupait les trois quarts de la chambre. Dans un coin, un gros baquet en bois, avec un couvercle, où chacun allait faire ses besoins, dégageait une puanteur asphyxiante. Les poux de corps, les poux de tête, les punaises sans nombre et les rats, se promenaient par régiments. On ne se donnait plus la peine de les tuer ; il y aurait fallu une existence.

Les pratiques les plus odieuses s’accomplissaient sous les yeux de tous. Turcs, Grecs, Arméniens ou Arabes, ils n’étaient plus des hommes. L’abjection humaine était telle qu’on ne pourrait la comparer, qu’à elle-même, car seul le genre humain, de toutes les créatures de la terre, peut se dégrader à ce point.

C’est dans cet enfer terrestre, au milieu de ces monstres que je tombai. Quelle aubaine pour eux !

Aucun ne prit ma défense, aucun ne me protégea, musulmans, pas plus que chrétiens. Bien mieux, ils se battirent pour la proie fraîche, s’arrachèrent les barbes, s’ensanglantèrent ; armés, ils se seraient tués !… Ainsi, pendant un mois, je connus les plus atroces offenses que l’on puisse concevoir…

Aujourd’hui, je ne regrette pas d’avoir passé par là ; c’est ainsi que j’ai connu