Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/47

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me défendre que je veux parler : oh, cela m’est égal !… C’est pour vous donner, moi, l’homme immoral, une leçon de vie à vous, qui êtes des personnes morales, surtout à vous, Mikhaïl, qui ne la connaissez pas toute, comme vous le pensez peut-être.

« Je suis un homme immoral et malhonnête. Pour la malhonnêteté, je m’en accuse ; quant à l’immoralité, c’est moi qui dois être juge. Le juge de qui ? Cela vous reste à voir. Une circonstance de ma vie vous en fournira le moyen ; et ce fait, c’est l’aventure de mon mariage.

« Vers l’année 1867, peu après l’entrée du prince Charles dans les principautés, je rentrais moi aussi dans mon pays, mais pas, comme lui, en prince. Je rentrais défait par la perte romantique de ma sœur aînée, et vicié par la vie aventureuse que j’avais menée en la cherchant pendant douze ans à travers l’Anatolie, l’Arménie et la Turquie d’Europe. Dommage pour vous que je ne puisse pas commencer par vous raconter mon enfance, la triste fatalité de ma sœur, et les circonstances de ma perversion. Ce serait trop long. Peut-être qu’un jour je le ferai, si vous voulez continuer à me serrer la main ; et si vous ne le voulez plus, cela me sera tout à fait indifférent.

« J’avais à ce moment-là dans les vingt-