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grands et forts comme des gdéalats[1], qui étaient établis précisément marchands de tapis et de cuivreries de Damas, à Galatz. Pour mon bonheur, je connaissais Damas et leur métier mieux qu’eux ; j’avais vendu souvent des tapis et des cuivres ciselés de ce pays-là.

« Pendant le repas je parle, je raconte des histoires et des scènes de la vie en « Anadole », et j’appuie surtout sur la tristesse que couvrent les tapis et les cuivres de Damas, où l’on voit travailler à leur fabrication, toute entière manuelle, des enfants de cinq ans et des vieillards presque aveugles : les premiers, gagnant deux météliques par jour (dix centimes), ne sachant, presque pas, ce que c’est qu’une enfance, et entrant dans la vie par la porte du supplice ; les derniers, s’épuisant d’inanition et n’ayant droit ni au repos ni à la sérénité de la vieillesse.

« Mes histoires amusent la demoiselle et, par leur côté triste, lui arrachent des larmes ; mais les autres ont le cœur dur ; ils ne retiennent que le côté anecdotique. Cela me déplaît, et si fortement, que je suis sur le point de reculer ; mais je me rappelle à temps que je ne viens pas dans cette mai-

  1. Bourreaux, en turc.