Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/52

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son pour épouser tout le monde. La fille se montrait à mon goût, et c’était elle que je voulais épouser.

« Avec elle, mes rapports se bornaient aux histoires et aux récits.

« Deux mois après ce premier dîner, je pouvais me considérer comme un intime de la famille. Dans cette maison, presque sans relations, régnait une atmosphère étouffante, mais la seule qui s’y asphyxiât était la joviale créature que j’aimais. Tous les soirs je venais passer deux, trois heures près d’elle, raconter, dire des boutades, et parfois chanter des airs orientaux, mélodieux et plaintifs. La tante et le père prenaient du plaisir, mais la fille s’engouait… Elle en voulait encore, et encore…

« Du magasin, le père avait chassé tout client tapageur, tout brouhaha ; et rares étaient ceux qui ouvraient la porte pour demander une consommation. Retirés dans l’arrière boutique à la porte vitrée, la tante, qui était la bonne à tout faire de la maison, raccommodait du linge et surveillait le magasin, peu éclairé, à travers les rideaux ; la demoiselle brodait ou faisait des dentelles, tandis que le père, étendu dans son lit à alcôve, sommeillait, gémissait parfois et m’écoutait. Il était bête à désespérer un