dit d’une voix plus mélodieuse que les cordes du violon :
« Dites, monsieur Isvoranu : pourriez-vous aimer comme le tzigane Trandafir ?… »
« Je ne saurais pas vous dire si sa main me brûla ou me glaça, mais je sais que je fus pris d’une panique soudaine, ma tête tourna comme si je tombais d’un toit, et, sans plus, j’attrapai mon chapeau et me sauvai.
« Elle avait pris cela pour une plaisanterie de ma part et rit fort en me voyant le lendemain. Mais moi j’étais désolé : ma peur de me trouver seul avec une femme se manifestait plus violemment que jamais. Tout l’espoir que j’avais mis dans le salut d’une intimité de plusieurs mois s’évanouissait ; je restais, bel et bien, l’homme à l’âme estropiée.
« Cependant, comme on fait avec les chevaux qui craignent le feu, je me mis à croire qu’à force de me promener la flamme sous le nez, je finirais par ne plus avoir peur d’elle. Et qui sait ? Que connaissons-nous de la nature humaine ? Moins que les bêtes !… Peut-être si j’avais eu le loisir de mâter mes sens pervertis et d’apprivoiser mes instincts devenus sauvages, aurais-je réussi à retrouver l’équilibre. Mais pour cela il m’aurait fallu la bien-