Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/73

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voure inespérée ; elle croyait sincèrement que je devais être lié par une sorcière, et priait le bon Dieu, avec ferveur, de vaincre le diable et de guérir son mari qu’elle aimait malgré sa défaillance.

« Cloîtrés tous deux, nous passions nos journées en des tête-à-tête interminables et d’une tendresse qui ne saurait être dépassée. Je lui demandais pardon… Elle me répondait qu’elle ne me voyait fautif en rien. Oh, comment pourrais-je oublier la seule créature humaine qui m’ait compris et qui ait eu pitié de moi ? Et qui peut certifier que, sans la haine qui nous empoisonnait, je ne serais devenu le mari et l’homme normal auquel j’aspirais de toutes mes forces ?… Déjà je n’étais plus si timide qu’au commencement, je n’avais plus peur de ma femme, plus cette frayeur qui me glaçait le sang aux premiers attouchements. Il y avait même des moments où de vagues désirs, de faibles réveils, de petites impulsions sensuelles me fourmillaient dans le corps et me faisaient rougir quand elle me serrait dans ses bras, me caressait, m’assurait de son amour.

« Mais ce que l’amour crée avec difficulté, la haine le détruit en un instant, et voilà ce que je ne pardonnerai jamais aux hommes. Tous les matins, à peine sorti de ma cham-