Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/115

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quête, comme moi, je suis content de me déranger pour ma petite cousine.

Il lança un adieu de la main et sortit sur les pas de Linérès, dont les grands yeux d’émeraude s’étaient oubliés un long moment sur ceux du marquis de Chazelet.

Alors, Pierre balbutia d’une voix sourde :

— Je vais me retirer.

— Vous… Pourquoi ?

— Je n’ai plus rien à faire ici.

Le Chef de la Sûreté haussa les épaules avec insouciance. Que lui importait que Chazelet fût ou non présent ?

S’il avait su par quel singulier enchaînement de circonstances, Pierre avait été conduit à l’hôtel de Armencita, il l’eût retenu sans nul doute. Il l’eût interrogé, car il eût alors deviné la piste que les réticences d’Allan lui avaient refusée.

Mais il ne savait pas.

Il ne comprit pas davantage la douleur qui faisait souhaiter au jeune homme l’isolement où il pourrait souffrir seul, sans avoir à se contenir.

Et il le laissa partir.

Le marquis sortit de l’hôtel complètement désemparé. L’attitude de Linérès lui avait déchiré le cœur. Elle refusait son dévouement. Avec l’humilité de qui aime réellement, Pierre n’avait point compris les regards de la jeune fille ; il n’avait point su lire la reconnaissance pour son courage et l’épouvante de le livrer aux périls qui avaient supprimé les prétendants à la main de la Fiancée du Diable.

Tel était son désespoir qu’il éprouva le besoin de le confier… Le nom d’Allan vint à ses lèvres.

Pourquoi cet homme, le plus récent parmi ses connaissances ?

Il ne se le demanda même pas, entraîné par une de ces impulsions irrésistibles qui nous dominent aux heures douloureuses.

À grands pas, il regagna le Palais d’Orsay.

— M. Allan est-il chez lui ?

À sa question, il fut répondu :

— Non… M. Allan n’est pas rentré !

Ce lui fut une tristesse nouvelle.

Il s’enferma dans sa chambre, sombre, en proie aux idées lugubres, se retraçant les incidents de la soirée.

À plusieurs reprises, des larmes débordèrent, rou-