Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/156

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— Parce qu’il convient que je m’exprime ainsi.

Et ses interlocutrices demeurant muettes devant cette affirmation.

— Je dois vous adresser une prière. Oubliez l’aveu que vous avez surpris.

— L’oublier, gémit Lilian, le pourrais-je ?

— Il le faut, miss Lilian, ou si l’oubli vous parait trop difficile, que vos lèvres ne le confient à personne. À vous, miss Grace, je fais la même requête. J’ajoute, et certain de votre amitié pour votre compagne, je pense que cela suffira : un mot pourrait causer ma mort, ce qui n’a point d’importance, mais aussi celle de miss Lilian et l’anéantissement d’une œuvre de justice.

Elles le considéraient ainsi que l’on regarde en rêve.

Et lui, triste et doux, continuait comme poussé par l’inéluctable fatalité :

— J’étais venu pour vous demander, miss Lilian, le désir d’un frère étant suffisant à vous décider à l’obéissance… Mais je ne suis plus votre frère, et je dois vous supplier ainsi qu’un serviteur.

— Un ami, rectifia la jeune fille.

Il eut un sourire navré :

— Ami, peut-être, si un ami de ce genre est assez discret pour ne point imposer de fréquentes entrevues.

Puis arrêtant les protestations sur les lèvres de son interlocutrice :

— Le temps s’écoule. Chaque minute contient une semence de douleur… Je parle devant vous, miss Grace, parce que je vous sais décidée, amie de votre compagne. Vous carderez le secret, et vous la conduirez dans le chemin de la raison.

Il passa la main sur son front. On eût dit qu’il essayait de chasser une souffrance, puis il reprit :

— Miss Lilian, je vous prie respectueusement d’assister aujourd’hui à la séance du Sénat.

— À la séance du Sénat ! se récrièrent les amies à l’énoncé de cette proposition, qui paraissait sans aucun lien avec les paroles précédentes.

— Oui, miss, je préviendrai miss Deffling, pour

    serviteurs, fournisseurs ou autres. Si l’on n’est pas assez familier pour user du pronom tout court, on le supprime purement et simplement dans le discours. On dit alors : bonjour, vous allez bien, etc.