Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/89

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Involontairement, le marquis se reporta en pensée aux articles de journaux consacrant autrefois les débuts de Linérès dans le monde.

Une soirée à l’Opéra, avaient-ils dit, une visite au salon de l’automobile !

Mlle de Armencita était venue là. Sa gracieuse silhouette s’était découpée sur ce perron monumental.

Et soudain, il lui sembla qu’à tout prix il devait la revoir, lui parler.

Ah ! elle aurait beau fermer sa porte, elle accueillerait celui qui lui apporterait son dévouement, le défenseur dont elle avait besoin.

Elle l’entendrait, le croirait, lui permettrait d’être son fidèle, de se placer entre elle et le danger.

Sur le balcon circulaire, plusieurs fenêtres étaient ouvertes.

Pierre put gagner ainsi un salon voisin de celui où devisaient ses compagnons de table.

Il courut au vestiaire, prit chapeau, canne, pardessus et, descendant prestement l’escalier, se trouva sur le trottoir de l’avenue de l’Opéra.

Longeant les maisons, avec la crainte informulée d’être aperçu de ceux auxquels il faussait si cavalièrement compagnie, il contourna la rotonde occupée par une agence automobile, se jeta dans la rue de la Paix.

Une voiture passait. Il y sauta.

— Cocher ! rue François-Ier.

Et il se laissa tomber sur les coussins en murmurant :

— Pourvu que l’on veuille me recevoir. Il faut que l’on me reçoive.

À ce moment même, un valet entrait précipitamment dans le salon où Morand et ses amis entouraient le chef de la Sûreté.

— On demande M. Lerenaud au téléphone.

Le fonctionnaire se leva sans précipitation, disant d’un ton détaché :

— On me prévient, sans doute, que le capitaine est entré à l’hôtel de Armencita.

Ce disant, son regard ne quittait pas M. Allan. Celui-ci se leva à son tour.

— Ma foi, cher monsieur, dit-il, je n’attendrai point l’assurance que cet officier prend le thé bien paisiblement, car je m’aperçois que j’ai oublié l’heure. Je n’ai que le temps de réparer ma distraction.

L’Américain sortit sur ces mots et se dirigea osten-