Page:Ivoi - Jud Allan, roi des gamins.djvu/91

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Il saisit la rampe d’un geste brusque.

— Allons à l’hôtel de la rue François-Ier… C’est peut-être là que se cache le bonheur de Lilian, et mon malheur, à moi… mais qu’importe, je suis si peu de chose.

Ses traits avaient recouvré leur expression calme.

Sans se presser, il descendit, gagna le trottoir ; un coup d’œil circulaire ne lui fit rien distinguer de suspect aux alentours.

Alors il héla un fiacre, et à l’automédon il lança ces mots :

— Rue François-Ier, je vous arrêterai…

Par la rue de la Paix, la place Vendôme, la rue de Rivoli, le véhicule gagna l’avenue des Champs-Élysées.

Allan ne bougeait pas. Mais si son corps demeurait immobile, sa pensée, elle, n’était point inactive.

— Ah ! grommelait-il… c’est Lui, lui qui dirige tout cela… Quel est son but ?… Je l’ignore… Mais je le découvrirai s’il consent seulement à se montrer. Que je tienne une extrémité du fil et je le suivrai jusqu’au bout… En écrasant cet homme, je briserai ma vie… Bah !… Que Lilian soit riche, adulée, heureuse… Cela seul est à considérer.

Le fiacre atteignait le Rond-Point et s’engageait dans la rue Montaigne.

— Nous arrivons, fit encore l’Américain… Mais lui, où est-il ? Il a quitté New-York depuis huit jours, à bord du paquebot La Provence… Hier, Tril m’a signalé son arrivée au Havre… Ai-je raisonné juste ? Va-t-il se montrer ?… Pourrai-je dire au président Loosevelt : « L’homme se juge au-dessus de tout soupçon… Il croit le moment venu de jouer sa dernière carte… Vous m’avez demandé une seule preuve, une seule, pour me prêter votre appui dans l’œuvre de justice… Cette preuve, la voici. »

Une brusque secousse le tira de ses réflexions.

La voiture s’était arrêtée à l’intersection de l’avenue Montaigne et de la rue François-Ier ; le cocher, se penchant sur son siège, demandait :

— À droite ou à gauche, patron… Vers le Cours-la-Reine, ou vers l’avenue de l’Alma ?

Allan ouvrit la portière.

— Je descendrai ici.

Il tendit quelques pièces de monnaie à l’automédon. Sans doute le pourboire était copieux, car le