— Un éclair alors ?
Un silence pesant plana. Dans tous les cerveaux s’était représenté brusquement le souvenir de la catastrophe d’Eissen, celui de l’explosion du 11ᵉ arrondissement à Paris. Dans les deux circonstances, les témoins avaient signalé l’apparence électrique du phénomène.
Et le Comte balbutia, sans avoir conscience de formuler sa pensée, ces deux mots dont tous frissonnèrent :
— Miss Veuve !
Mais de nouveaux acteurs s’ouvrirent un passage à travers les rangs des curieux. Deux aides de camp, qui viennent d’interroger les équipages des dirigeables Gross et Parsifal, se mêlent à l’entretien. Sur leurs lèvres, en dépit de la gravité des circonstances, se devine un désir immodéré de rire.
— Ah ! s’écrie l’un, dans les incidents les plus détestables, la bouffonnerie prend sa place. Savez-vous ce que nous racontent ceux du Gross et du Parsifal ?… Je vous le donne en mille…
— La terreur les a rendus fous, appuie l’autre. Seulement, nous ne pouvons rapporter semblables billevesées à Sa Majesté. Aussi venons-nous interroger Herr Zeppelin qui, lui au moins, nous dira des choses sérieuses.
Et avec ironie :
— Voyons, vous êtes d’accord avec nous. Il fait un temps superbe.
— On ne saurait le nier.
— Parfait ! Pour vous comme pour nous, le soleil brille. Il n’y a pas un nuage au ciel. Eh bien, ces pauvres gens prétendent… Oh ! ils déclarent n’avoir point vu, mais seulement entendu…
— Le bruit caractéristique d’un éclair, achève vivement le pilote Dielen.
Les aides de camp sursautent, un étonnement sur le visage.
— Juste ! Comment avez-vous deviné cela ?
— D’une façon bien simple, Messieurs. J’ai eu moi-même semblable impression.
— Hein ?
Cette fois, les officiers ne rient plus. Ils ont le sentiment que l’incompréhensible les frôle de son aile. Et leurs yeux agrandis par une curiosité intense, interrogent. Le comte Zeppelin redit :
— Miss Veuve !
De nouveau, le silence règne. Les idées se bousculent dans les cerveaux,