Page:Ivoi - La Mort de l’Aigle.djvu/243

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— Une alliance, vous… Ah ! bien je voudrais voir la fiancée qui vous passera à son doigt.

— Vous êtes idiot, digne Galimafré. Cela ne me surprend pas, car vous passez votre existence à clouer…

— À clouer, patron… cela rend donc idiot ?

— Sans doute ! cela indique un coup de marteau chronique.

On rit dans la salle, et Bobèche retrouvant tous ses moyens avec la faveur du public, poursuivit :

— Donc, je suis la Sainte-Alliance, et vous Napoléon.

— Pas possible, patron.

— Et pourquoi, je vous prie.

— Parce qu’il me faudrait une figure on or… Sur toutes les pièces de 20 francs, Napoléon a une figure en or.

— Vous aurez une figure en peau, voilà tout, en attendant qu’on la mette en pot ainsi qu’un cornichon.

— Je veux bien.

— En ce cas, commençons.

Un salut au public, puis Bobèche d’un ton arrogant de matamore :

— Je suis l’Europe ; j’ai grande envie de corriger ce petit Napoléon, qui fait trop de bruit et me rompt les oreilles.

— Moi Napoléon, j’ai envie de couper les vôtres.

— Les couper…, misérable avorton…, attends, attends. Tu fais le brave parce que je suis loin, couché sur les reins… non sur le Rhin, mais j’accours. Tu es à Troyes.

— À trois, non je suis seul.

— À Troyes, la ville de Troyes.

— Bon ! bon ! M’y voici, jolie cité, des andouillettes exquises.

— Qu’est-ce que tu fais ?

Je les mange.

Le pitre leva les bras au ciel en un geste d’éloquent désespoir ;

— Ce garçon est stupide, il a une stupidité royale… non, impériale veux-je dire, allons, Napoléon-Galimafré, je t’explique.

— Ce n’est pas la peine. Probablement que vous n’avez pas été dans le notariat, je ne vous comprends jamais.

— Qu’est-ce que le notariat a à voir là dedans.

— Dame, ayant passé par une étude, vous sauriez être clair (clerc).

Les assistants riaient à gorge déployée. Seul d’Artin restait sombre. Il reconnaissait, avec une rage croissante qu’Espérat tenait adroitement son rôle…