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LE MAÎTRE DU DRAPEAU BLEU

— Adieu, Maître, souviens-toi de Peï. Suivez la route jusqu’à Loost-Bridge, le pont de bois jeté sur le profond Loost, cet affluent du Gange ; puis sur l’autre rive, gagnez Sampoor-Tower. Alors vous serez très en dehors du cordon vigilant établi par le Log.

— Merci, en avant !

Le Turkmène avait rendu la main à sa monture, ses compagnons l’imitèrent. Il leur sembla bien que les gamins leur criaient quelques paroles, mais le galop des quadrupèdes couvrit les voix.

Maintenant les fugitifs filaient comme des flèches, laissant en arrière champs, bouquets d’arbres, prairies, bois, plantations diverses.

— Loost-Bridge !

Ce cri exprime une déconvenue. Ils ont atteint l’endroit où ils comptaient franchir le cours rapide de l’affluent du Gange… Mais le pont de bois n’existe plus.

Dodekhan a sauté à terre, il examine les points où le tablier de la passerelle reposait sur la rive. Il a un rugissement douloureux :

— Le pont a été coupé par des hommes. Voici la trace des scies qui ont sectionné les planches. Ils ne veulent pas nous laisser échapper !

Il y a un grand silence angoissé, puis Sara interroge :

— Si nous traversions à la nage.

— Impossible, le courant emporterait chevaux et cavaliers.

— Et aucun gué aux environs ?

— Aucun.

— Alors, que faire ?

— Pousser droit devant nous jusqu’à la rencontre d’un autre passage.

— Allons donc.

Et la course folle recommença. Personne ne parlait plus ; à l’espérance avait succédé un découragement morne. Les buissons, les moindres soulèvements du terrain attiraient les regards anxieux des fugitifs.

La rupture du pont leur avait rappelé que la puissance de Log s’étendait sur l’immense superficie de l’Asie.

La contrée se faisait plus déserte, plus sauvage. Ils traversaient les marécages de Loanes, bordés de hauts bambous, faisant s’envoler sur leur passage des troupes apeurées d’oiseaux aquatiques.