évasés, ainsi que des gueules de serpents qui bâillent.
Non, un déclic se produit… Une carte apparaît semblant sortir de l’habitacle.
Une carte sur laquelle est piqué, à l’orée de la Manche, à peu près à égale distance des côtes du Finistère et des îles Britanniques, un petit drapeau bleu, réduction de celui que Sara a remarqué à La Haye, dans la salle du Congrès, flottant à l’arrière de l’aérostat descendu de la coupole.
C’est, à n’en pas douter, le point où est parvenu le Maharatsu.
Un instant, la carte reste étalée sous les yeux des jeunes gens, puis elle se replie, à la façon d’un éventail, et disparaît dans un conduit caché par la garniture de cuivre du cadran.
— Nous entrons dans l’Atlantique.
— Nous avons bien marché.
— Certes.
Il y a de la surprise dans la voix de Lucien et de Sara. De la surprise et aussi de l’inquiétude.
Où les emporte ce bateau rapide, silencieux… et sinistre ?
Mais un nouvel étonnement arrête l’expression de leur angoisse. Une voix légère comme un souffle chuchote à leurs oreilles :
— Êtes-vous encore sur la passerelle ?
Qui a parlé ?… On dirait que ces sons ont été apportés sur l’aile du vent… Ils songent au télégraphe sans fil, puis ils haussent les épaules.
Ils sursautent, se retournent… Personne.
— Les oreilles m’ont corné tout simplement, prononce la jeune femme avec une moue…
— Mais moi aussi, déclare Lucien.
Et comme ils se regardent interdits, ne comprenant pas ce bourdonnement auriculaire qui les a atteints au même moment, de nouveau ils perçoivent distinctement :
— Êtes-vous encore sur la passerelle ?
— Qui nous parle ?
La question a jailli de leurs lèvres presque à leur insu.
— Un prisonnier comme vous.
Et vite, la voix inconnue :
— Pas un geste… La passerelle est le seul endroit du navire où l’on ne puisse épier vos paroles.