jumelle marine de sa compagne, regarda un instant et reprit :
— Mais c’est un canot. Pas de voiles, pas d’avirons. Ah çà ! ce serait donc un automobile comme le nôtre ?
Tibérade et le Japonais, intrigués par les exclamations de la fillette, observèrent à leur tour l’embarcation signalée.
Seulement cet examen leur procura une surprise qu’ils traduisirent par ces répliques quelque peu inquiètes :
— Monsieur Tibérade.
— Général ?
— Ai-je la berlue ? Il me semble que ce canot suit rigoureusement le même chemin que le nôtre.
— Oh ! au sortir d’un port, c’est chose normale. Tous les bateaux circulent sensiblement suivant une même ligne.
— Vous avez sans doute raison, attendons pour nous faire une opinion.
À dater de ce moment, les lorgnettes ne quittèrent plus l’embarcation suspecte, et au bout d’une demi-heure, il fallut bien constater que sa route se confondait d’étonnante façon, avec celle du no 4 que les voyageurs occupaient.
— Par les dix mille bouddhas bienfaisants, gronda le Japonais, ce canot a l’air de nous chasser à vue.
Comme Marcel hochait la tête d’un air de doute, l’officier grommela :
— Nous allons bien le voir.
Sur ces mots, il rejoignit le mousse Picciolo, qui, tout à son gouvernail, ne paraissait pas avoir remarqué l’incident.
— Changez de direction, lui dit-il ; je veux m’assurer des intentions d’un bateau dont les manœuvres m’inquiètent.
Picciolo donna un coup de barre à bâbord, mais l’abattée du no 4 s’était à peine indiquée, que l’embarcation inquiétante exécutait à son tour le même mouvement
— Cette fois, pas de doute, reconnut Tibérade ; on nous poursuit.