Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/156

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Dans l’esprit de chacun, l’image de leur persécuteur Midoulet s’était dessinée.

— Quel aspect a ce « client » ? murmura enfin le général.

— C’est un bonhomme de haute taille, imberbe, les yeux bleu d’acier, la face maigre.

— C’est lui ! s’écrièrent les passagers d’une seule voix.

Et se tournant vers le mousse Picciolo, Uko, convaincu de l’impossibilité de distancer son adversaire, commanda :

— Reprends notre direction première, petit.

Puis s’adressant à ses compagnons :

— Tant qu’il nous verra, il ne faut pas songer à lui brûler la politesse.

— Alors ?

— Alors, je compte sur la nuit, qui nous sera une alliée propice,

— Sur la nuit ? Quel avantage nous donnera-t-elle ?

— Celui de changer de route, sans qu’il soit à même de s’en apercevoir. À l’aube, quand la lumière reparaîtra, nous serons hors de vue.

— Bravo ! Voilà ce qu’on peut appeler une idée !

L’approbation, jaillie des lèvres d’Emmie, de cette gamine de Paris si prime-sautière, dérida ses compagnons. Tous oublièrent leur méchante humeur.

Évidemment, il convenait de ne plus s’occuper du canot 2, tant que la lumière se ferait la complice de l’agent.

Les ténèbres venues, rien de plus simple que de lui fausser compagnie.

À lui, l’appui du soleil : à eux, le secours de la nuit favorable aux fugitifs.

Bref, l’espoir du succès mit tout le monde en joie, et certes, si le dicton populaire correspond à une réalité, les oreilles de l’agent durent tinter, car les plaisanteries à son adresse ne furent pas épargnées.

Le jour s’écoula, le crépuscule sema sur la mer sa cendre grise qui, se fonçant peu à peu, se transforma en nuit opaque.

On avait interdit à Picciolo d’allumer le feu de position.