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Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/340

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bare. Rien ne pourrait désormais le décider à renoncer à la réalisation de sa volonté.

Et cependant luttant jusqu’au bout, Sika tenta encore de fléchir son interlocuteur.

— Je vous en conjure, accordez-moi la journée que je sollicite, de votre courtoisie. Vous m’offrez vos millions, vos palais, vos troupeaux. Auprès de cela, que sont vingt-quatre heures ?

— Un retard à mon bonheur… Je n’en admets plus.

— Prince, je vous supplie… commença-t-elle.

Il serra les poings, et l’interrompant brutalement :

— Vos prières trahissent votre sentiment. Je vois que je vous fais horreur.

« Maladroit à plaider ma cause, je vais charger de ce soin des voix dont l’éloquence vous paraîtra irrésistible, j’en suis assuré.

Sur ces mots, le Persan s’élança au dehors.

Sika se retrouva seule, terrifiée par les dernières paroles d’Ahmed. Que signifiaient-elles ? Quelle menace était enclose dans leurs syllabes mystérieuses ?

À quelles voix avait-il fait allusion ? Quelle torture attendait la jeune fille ? Quelle épouvante la contraindrait à accepter l’union odieuse ?

Oh ! Rien ne la déciderait au marché honteux.

Elle mourrait plutôt que de renoncer à Marcel, à lui qui, par son dévouement, avait conquis toute sa tendresse. Elle était sûre d’elle-même, depuis qu’elle avait vu clair en sa pensée.

Mais mourir à vingt ans, quelle dure solution ! Et elle eut un gémissement quand la porte se rouvrit… Qu’est-ce encore ? Des serviteurs Beloutches, au visage sinistre, paraissent ; ils s’avancent vers la captive pétrifiée par la terreur !

Rudement, ils la saisissent, brisant sans effort sa faible résistance ; leurs mains brutales meurtrissent l’épiderme de la prisonnière qu’ils entraînent hors de l’appartement où elle a tant souffert.

Elle a peur, horriblement peur. Elle tremble. Et cependant elle veut savoir quel sort lui est réservé.

Elle balbutie :

— Où me conduisez-vous ?

Mais ses guides ont sans doute la consigne de rester muets. Ils haussent les épaules sans répondre.