Et puis, l’ahurissement de la reine, sa colère, devant la plaisanterie inqualifiable et incompréhensible.
Et ses gestes furibonds, ses menaces.
Ah ! l’ambassadeur n’en avait pas laissé passer un seul.
Il avait vu le moment où la furieuse princesse allait le gifler.
Mais elle avait trouvé mieux pour se venger.
Elle avait fait appeler le résident de France, et lui avait dévoilé les pourparlers engagés avec le Japon depuis plusieurs mois.
— Ah ! s’écria Emmie, dont les yeux rieurs brillaient singulièrement ; quand je songe que le général m’a obligée à l’accompagner, de peur que je trahisse le but de son déplacement ! J’ai pensé m’évanouir de honte lorsque, dans le palais, parmi les dignitaires de la couronne, après nous avoir introduits comme ambassadeurs, moi emboîtant le pas à votre père, Sika, j’ai entendu la teneur stupéfiante de la missive.
Et d’un ton courroucé :
— De qui se moque-t-on ici ? de la reine ? du plénipotentiaire ?… Qui le dira jamais !
Elle semblait si affectée par l’aventure que la gentille Sika, l’intraitable Célestin Midoulet lui-même s’évertuèrent à la consoler, aidés par mistress Lydia et son « engagé » Pierre.
Cependant tous regagnaient le logis, voisin de la résidence française, où les amis des légats si cruellement joués avaient élu domicile, à leur arrivée à Tananarive.
Chacun se retira dans sa chambre pour se remettre des émotions inattendues de la journée.
Mais à peine Marcel s’était-il enfermé dans la sienne, qu’on heurta légèrement à la porte.
— Entrez ! fit-il, croyant à la venue d’un domestique.
Sur le seuil se montra sa petite cousine.
— Toi, reprit-il, un peu surpris, que désires-tu ?
— T’empêcher de considérer le mikado comme un personnage épris de facéties d’un goût douteux.
— Allons bon. Voilà que tu t’intéresses à la réputation du maître du Japon !