Et tout pensif, Marcel demeura sur le palier, appuyé à la rampe, cherchant à apercevoir encore la fine silhouette de la ravissante étrangère. Emmie vint s’accouder auprès de lui.
— Hein, fit-elle entre ses dents ; cette fois, tu as une bonne place : porte-pantalon d’un général.
Il se tourna vers elle, mi-rieur, mi-fâché.
— L’emploi est un brin ridicule, je le sais bien, mais il est payé…
Il brandissait le portefeuille pansu. Elle secoua sa tête mutine.
— Oh ! tu sais, je ne plaisante pas… Je crois sérieusement que tu tiens la fortune…
Elle prit un temps avant d’achever :
— La fortune et la tendresse.
— Emmie, murmura-t-il d’un ton de reproche bouleversé par l’affirmation de la petite.
Mais elle l’interrompit :
— Elle est jolie, jolie… ; ton goût est indiscutable. Si je parle de cela, c’est qu’il m’a semblé…
— Il t’a semblé quoi ?
— Que Mlle Sika a une reconnaissance infinie pour son sauveur. Tu as sauvé toute sa personne ; elle pourrait bien t’offrir une petite commission, sa main, par exemple.
— Oh ! balbutia-t-il, tais-toi, petite folle, tais-toi.
Cependant le général Uko et sa fille avaient gagné la rue Lepic.
— Allons au télégraphe, proposa l’officier.
— Au télégraphe ?
— Oui. Je pense que tous les accidents qui nous assaillent depuis quatre jours sont dus à un espion.
— Je le pense aussi, père.
— Et un espion ayant ses entrées à l’ambassade japonaise.
— Tout à fait probable. Mais je ne vois pas le rapport du télégraphe avec ce personnage inconnu.
— Direct le rapport, ma chérie. Il me permettra de renseigner le curieux, de façon à nous assurer un peu de sécurité.
— Je ne comprends pas.
— Suis-moi, et tout te deviendra clair.