Il dormait, lui. Elle écouta à la porte. Aucun bruit. Il fallait le laisser se reposer. « Ma foi, se dit-elle, un tour dans les environs me calmera les nerfs, et je serais heureuse de me recoucher. »
Sur ce, elle ouvrit doucement la porte du couloir et se glissa dehors. Tout était silencieux. Les lampes, voilées par les vélums de nuit ne répandaient qu’une clarté incertaine. Le train, filant à grande allure à travers la campagne, projetait la promeneuse d’une paroi à l’autre. Elle s’obstina, poussée en avant par une pensée obscure, gagna le fond du couloir, franchit le soufflet et passa dans le wagon suivant. Le même silence y régnait. Ici, comme dans le véhicule que venait de quitter la fillette, tous les voyageurs dormaient.
— Le général et Sika doivent être installés là ! se confia Emmie en s’arrêtant… Oui, quatrième et cinquième portes ; celle-ci au papa, celle-là à la fille.
Brusquement, elle interrompit son monologue ; la porte placée la cinquième tournait lentement sur ses gonds.
— Quelle chance ! reprit-elle. Le général veille comme moi ! On pourra faire un brin de causette.
Déjà elle se portait en avant, mais son mouvement ne continua pas. Une haute silhouette se dressa dans l’encadrement de la porte désignée, et celle-ci se referma sans bruit sur un personnage qui ne rappelait en rien le général Uko.
Dans la pénombre, la fillette distingua vaguement des traits anguleux, une face glabre, des yeux ardents. Il lui sembla que l’énigmatique voyageur portait sur le bras un paquet d’étoffes ; on eût dit des vêtements. La vision, d’ailleurs, ne dura qu’une seconde.
L’inconnu s’était arrêté net, surpris d’apercevoir une personne devant lui, puis d’un pas rapide, courant presque, il s’élança vers l’avant de la voiture et disparut. Sans doute, il avait gagné le wagon voisin.
— Curieux ! balbutia Emmie songeuse. J’aurais parié que là était le compartiment au général… Je me