Page:Ivoi - Le Message du Mikado.djvu/71

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suis trompée, à moins que ce digne Japonais ait organisé une réception, une petite fête de nuit.

La réflexion lui rendit le sourire, et n’attachant aucune importance à l’incident, ses nerfs calmés lui rendant la perception de la fatigue, elle revint a son wagon, réintégra sa couchette, et cette fois tomba dans un profond sommeil.

Combien de temps dormit-elle ? Il lui eût été impossible de le dire quand elle reprit conscience des choses. Elle se frotta énergiquement les yeux, regarda autour d’elle, étonnée de se trouver en cet endroit, si différent de sa modeste chambrette de la rue Lepic ; puis ses idées se clarifièrent. Le souvenir lui revint.

Dans sa pensée, les événements des dernières vingt-quatre heures défilèrent. Elle revécut la soudaine intrusion du général dans le pauvre intérieur de Marcel Tibérade, son absurde pari, sa proposition si étrange, la fortune pour la garde d’un pantalon. Quelle garde d’honneur, en vérité !

Et puis le départ.

Soudain une angoisse s’empara d’elle. Si on l’avait oubliée dans ce train qui roulait toujours avec un bourdonnement métallique.

Cela encore lui fit hausser les épaules.

Est-ce que son cousin Marcel était capable d’une aussi énorme distraction ? Évidemment, on n’était pas arrivé à destination. Cependant l’inquiétude inexplicable continua de peser sur elle, si bien qu’elle se dressa d’abord sur sa couchette, puis se leva, et pour la seconde fois, s’aventura dans le couloir aussi désert, aussi silencieux que lors de sa promenade antérieure. Un instant, elle s’amusa à regarder à travers les vitres. Le paysage, maintenant, apparaissait confusément sous les lueurs imprécises de l’aube naissante. Peu à peu, les détails se faisaient plus nets ; les champs, les bois, tout à l’heure plaqués dans un même plan d’ombre, prenaient leur relief du jour.

Alors, nouvelle question. Combien de temps allait-on encore rouler ainsi ?