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Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/198

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cour, il avait empoigné l’un des pilotis et s’était laissé glisser jusqu’au sol, sans souci des plantes grimpantes, auxquelles cet exercice de gymnastique ne fut rien moins que salutaire.

Une fois en bas, Albin se faufila de cabane en cabane. Les palefreniers ou serviteurs ne firent pas attention à lui. L’œil du maître était braqué ailleurs, et jamais la surveillance des mercenaires n’égale son acuité. De la sorte, sans être gêné en rien, le jeune homme parvint sous la fenêtre où, tout à l’heure, il avait reconnu Oraï.

Il ramassa un caillou, l’enveloppa soigneusement de la feuille arrachée à son carnet, puis d’un mouvement bien calculé, projeta le tout vers l’ouverture. Missive et pierre disparurent dans la chambre visée.

Ceci fait, Albin reprit en courant le chemin de son logis, y grimpa avec l’agilité d’un écureuil et s’y enferma à l’instant même où Rigjoon et le faux douanier se séparaient, très contents l’un de l’autre.

S’ils avaient pu entendre Mable et Eléna, leur plaisir eût été moindre.

Après la sortie du sacrificateur, les Anglaises s’étaient regardées, avaient hoché la tête, étendu les bras, avancé les lèvres en « peuh ! » dubitatifs, gestes qui, dans leur ensemble, signifiaient : indécision, incompréhension, trouble. Après quoi Mable avait susurré :

— Que veut dire tout cela ?

— Je vous le demanderai, repartit aussitôt Eléna ?

De nouveau les yeux, les têtes, les bras se remirent en mouvement.

— En Amérique déjà, reprit mistress Doodee, beaucoup de peuple s’est conduit à notre égard comme s’il était en état de folie.

— Oh ! oui ! de folie même dangereuse.

— À Java, nous rencontrons la même chose sur notre voie.

— Très sensiblement la même.

— Et cela est incompréhensible. Vous trouvez aussi, miss Grace ?

— Je trouve.

Durant plusieurs minutes, elles continuèrent sur ce ton. Peu à peu cependant, vu la nécessité de se don-