Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/292

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Sans sourciller, Morlaix l’interrompit :

— Secret d’État.

Peindre la figure du commis est impossible. À son secret professionnel venait s’opposer le secret d’État. Jamais, dans sa carrière, il n’avait vu situation plus complexe, et le méritant personnel des Postes, Télégraphes et Téléphones de tous les pays civilisés, frémira à la pensée de ce collègue lointain pris dans l’étau de deux secrets.

Son maintien perdit de son assurance ; ce fut d’une voix hésitante qu’il se décida à demander :

— Avez-vous au moins des papiers certifiant…

Il allait dire : l’identité, par la force de l’habitude. Il retint à temps le mot inutile et acheva :

— La réalité de votre mission ?

Tranquillement, Morlaix laissa tomber :

— Non.

— Mais alors, clama l’agent désolé, comment voulez-vous que je me délie du secret professionnel ?

— Vous avez deux moyens.

— Je les adopte tous les deux.

— Point ! Car l’un est médiocre, et l’autre excellent.

— Guidez-moi donc, monsieur, je choisirai celui que vous préférerez.

Morlaix adressa un regard triomphant à ses compagnons. Il avait fort habilement retourné la situation. Le télégraphiste, un tantinet arrogant comme tous ses congénères, — ceci soit dit sans les offenser, — venait à résipiscence.

D’un ton détaché, l’ami d’Albin reprit :

— Pour vous assurer que vous devez nous renseigner, il vous suffit de télégraphier à Son excellence le Résident de Djokjokarta.

— Idée lumineuse ! s’écria le commis, bondissant vers son manipulateur.

Morlaix l’arrêta.

— Un instant !

— Qu’y a-t-il encore.

— Je n’ai pas fini.

L’employé se rassit docilement :

— Je concentre mon attention sur les paroles que vous devez me faire entendre.

— C’est au mieux. Vous télégraphiez au Résident,