Page:Ivoi - Le Serment de Daalia.djvu/388

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Soudain, un sourd murmure parcourut le groupe.

Dans l’ombre bleue, un coursier fumant avait débouché des taillis et, sur son dos, sans souci des règles élémentaires des cours d’équitation, brimballait une forme humaine et simiesque, cramponnée d’une main au pommeau de la selle, et agitant frénétiquement l’autre, comme pour faire des signaux indéchiffrables.

Cela approche et soudain Daalia a un cri :

— Rana, c’est Rana.

— Ma première fiancée, plaisante Albin.

— Ne dites plus cela. Rana, ma nourrice dévouée.

Niclauss et Fleck ont entendu.

Ils ont un mouvement de rage, car ils comprennent combien ils ont été bernés. Dans leur esprit passe la conviction que l’entente de Daalia et de Gravelotie n’est point récente, qu’elle remonte à l’arrivée du jeune homme à Sumatra, et peu à peu, ils en viennent à accuser l’oncle de les avoir dérangés dans leur existence.

Comme tous les coquins, ils oublient que leur seul but a été de dépouiller le planteur.

Ils exprimeraient bien leur mauvaise humeur, mais le cheval arrive au galop. Il s’arrête devant Daalia. La vieille Rana se laisse glisser à terre et enlaçant sa jeune maîtresse dans ses bras :

— Il faut fuir, petit oiseau d’azur, il faut fuir. Ils seront ici avant une heure.

— Qui, ils ?

— Moralès et aussi Oraï.

Ces deux noms accolés font pâlir la jeune fille.

— Tu ne veux pas dire qu’ils sont ensemble, nourrice ?

— Si, si, et même…

— Achève, je t’en prie. Il y a de la terreur dans ton regard, dans ta voix. Quel malheur nouveau nous menace ?

— La vengeance de M’Prahu !

Ces mots sonnent dans la nuit de façon menaçante.

On dirait qu’ils éveillent des échos railleurs et cruels.

Tous écoutent, et nul n’ose adresser une question à la vieille nourrice.

Celle-ci cependant s’explique :

— C’est un nommé Antonio qui vous à conduits ici ?