« Mais que votre jeune laquais, à qui je confie ce pli, vienne, s’il vous convient, me porter vos instructions à Porto-Ferrajo. Vous êtes inspirée à ce que je crois par lord Castlereagh et par M. de Talleyrand. Il me semble donc conforme aux intentions de la Sainte-Alliance de vous offrir mon concours.
« Quelle que soit la suite que vous croirez devoir donner à ma proposition, voyez en moi, Madame, votre très humble et très obéissant serviteur. »
Il y eut un silence ; ce fut Espérat qui le rompit :
— Daignerez-vous me charger de lui porter vos instructions, Madame.
Elle tressaillit :
— Vous voulez… ?
— Qu’il parte ce soir.
— Ce soir ?
— Sur le même bateau que vous.
Et doucement.
— Henry vous accompagnera pour retenir l’espion à Livourne durant huit jours.
— Est-ce possible ?
— L’Empereur a prouvé que tout est possible. Or, l’Anglais est bien gênant ici. Nous avons besoin de l’envoyer sur le continent, donc, il ira et il y restera.
Napoléon poussa une exclamation :
— Je devine vaguement ton idée. Bravo, mon jeune ami ; tu es toujours plein de ressources.
— J’ai vécu près de vous durant la campagne de France, Sire, et à votre école, j’ai appris.
L’Empereur sourit.
— Eh bien, ma chère comtesse, permettez-vous ?
Elle inclina la tête :
— Il faut bien lever le dernier obstacle dressé entre Votre Majesté et l’amour de la France.
À ce moment un coup de tonnerre retentit. Une rafale furieuse ébranla la maison.
- ↑ Confidences de M. Vizentino, greffier à Porto-Ferrajo.