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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/133

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Partout elle ne vit que gens approuvant la conduite inexplicable du señor Armadas.

— C’est à devenir enragée, soupira la charmante créature en se laissant choir sur son siège.

Mable, à ce moment, chuchota à son oreille :

— Il n’y a qu’une manière d’expliquer ce qui nous arrive.

— Dites-la, Mable, car, moi, je n’en vois pas.

— Eh bien, je pense le capitaine fou, et aussi l’équipage, et aussi les passagers.

— Quoi, tous ?

— Yes, une épidémie.

— Mais alors, nous sommes dans un grand danger.

— Un très grand.

— Quoi faire, chère miss ?

— Ah ! chère mistress, suivre le conseil des médecins.

— Que conseillent-ils ?

— De ne pas contrarier les pauvres insensés, afin d’éviter des crises de folie furieuse.

— Vous avez raison, ma bonne Mable.

Et mistress Elena, chez qui la rage avait fait place à l’épouvante, se servit et se prit à manger sans regarder personne.

Soudain elle tressaillit.

Le steward s’était rapproché d’elle, et lui désignant son réticule suspendu à l’autre extrémité de la salle :

— Vous le voyez, señora ; il est très bien là.

Elle pensa s’étrangler de frayeur, ce fou qui la touchait presque, horreur ! Mais se rappelant la recommandation de Mable, elle trouva le courage de sourire pour répondre à son interlocuteur :

— En effet, très bien ; je vous remercie d’avoir trouvé une si bonne place.

À côté d’elle, Stella et Jean causaient à voix basse :

— Ces pauvres femmes me font pitié, disait la jeune fille.