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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/132

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du secret de Stella, d’autant plus exaspérées qu’elles ne trouvaient aucune raison plausible à leur aventure. Alors Elena et Mable se vengèrent en essayant de fatiguer leur escorte.

Ce fut par le pont, les escaliers des passerelles, les couloirs des cabines, une course incessante.

Mais bientôt, les pauvres filles d’Albion durent reconnaître qu’à ce jeu, elles se lasseraient sans améliorer leur situation. Toutes les heures, en effet, le piquet préposé à leur garde était relevé et remplacé. Tout le monde, d’ailleurs, paraissait trouver la conduite des marins fort naturelle.

Équipage, gens de service, passagers les encourageaient au passage par de bonnes paroles, par des offrandes de cigares, tabac et cætera.

Elena, Mable étaient donc seules à se débattre en plein mystère !

Enfin l’heure du déjeuner sonna. Brisées, pâles de mécontentement et de fatigue, elles gagnèrent le dining-room.

Selon son usage, Elena accrocha son réticule — elle avait un nouveau sac de soie — au dossier de son fauteuil.

Aussitôt un steward sauta sur le fragile objet.

— Mon réticule ! rugit la propriétaire.

— Je vais l’accrocher à la patère là-bas, riposta le serviteur. Le capitaine ne veut pas qu’il reste à portée de votre main pendant le repas.

— Mais c’est de la tyrannie !

— Si vous voulez.

— Je me plaindrai à mon consul, à la première escale.

— Ne vous gênez pas. En attendant, ici, le capitaine est mettre absolu ; le mieux est de se conformer à ses ordres sans murmurer.

En vain Elena promena ses yeux autour de la table, avec l’espoir de rencontrer un appui parmi les passagers.