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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/135

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cesse sur les traces des infortunées Saxonnes, et Jean lui-même, dans le but louable de détourner les soupçons possibles, s’était improvisé gardien de celles dont, mieux que personne, il connaissait la parfaite innocence.

Comme la justice ne perd jamais ses droits, Gairon et ses amis remerciaient Ça-Va-Bien de son zèle, et invectivaient Elena.

Irritées, malgré leur volonté bien arrêtée de ne pas aller à l’encontre des idées des déments dont elles se croyaient entourées, les Anglaises dînèrent, puis furent s’enfermer dans leurs cabines.

Des factionnaires sont aussitôt placés dans le couloir. Mais le chasseur Francis se lamente.

— Vingt-quatre heures sans nourriture ! ma pauvre Dolorès !

Cette fois, Massiliague ne trouve pas un mot pour le consoler. Lui aussi a compté les heures, sa joyeuse mine s’est assombrie à mesure que l’aiguille tournait sur le cadran.

— Vé, au bout de vingt-quatre heures, on commence à sentir des tiraillements !

À ce moment, le Madalena qui prolonge la côte à cent kilomètres, subit un roulis inaccoutumé.

Il traverse le courant de l’Amazone, dont les eaux refoulent celles de l’Atlantique jusqu’à cent soixante kilomètres de la côte.

On est en face du fleuve Roi, mais on le dépasse pour atteindre le port de Sao-Luls de Maranhao, d’où les voyageurs devront revenir sur leurs pas, afin de gagner le delta du puissant cours d’eau.

Et Scipion, agacé par le roulis, bougonne :

— Pécaïre, ce mouvement d’escarpolette doit être douloureux pour une personne à jeun.

— N’est-ce pas ? souligne la voix triste de Gairon.

Mais le Canadien a un juron :

— Tonnerre ! Je ne puis supporter cela plus longtemps.