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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/28

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vettes, de ballons de verre, un homme d’une soixantaine d’années, aux cheveux blancs, dormait, ses lunettes d’or sur le nez.

C’était inconcevable et sinistre.

Au hasard de ses recherches, Jean se retrouva dans la chambre de la jeune fille. Par la fenêtre, il distingua le volcan dont la cime se couronnait de vapeurs roussâtres. Cette vue dissipa son trouble, le rappela à la réalité.

La réalité… ; chose horrible… ; une explosion formidable, préparée par la main des hommes, et qui allait tout briser, brûler, pulvériser sur son passage… De cette adorable enfant paralysée là, sous ses yeux, par un invincible sommeil, il ne resterait rien qu’un peu de cendre, que la lave en fusion emporterait vers la mer.

— Non, cela ne peut être, cela ne sera pas ! s’écria l’ingénieur parlant comme en songe.

Sa montre consultée lui apprit que dix minutes seulement le séparaient du moment où exploserait la mine de señor Olivio.

Dix minutes… Tant pis !… Essayer de la sauver ou périr avec elle.

Dans ses bras, il enleva la dormeuse, enjamba la fenêtre, se hissa sur son cheval avec son précieux fardeau, et enfonçant ses éperons dans les flancs de sa monture qui bondit de surprise et de douleur, il partit à fond de train vers l’Est.

L’animal hennissant, affolé par les ardillons d’acier qui fouillaient sa chair, filait comme une flèche.

De la route, Jean n’avait cure.

Les obstacles, il les franchissait au vol. Buissons, palissades, murs bas de pisé, rien ne ralentissait la course effrénée.

Cinq kilomètres sont ainsi franchis… ; le coursier halette, ses jambes perdent leur élasticité. Jean le pousse toujours, le soutenant de la voix et des rênes.

Voici la crête du morne Rouge.