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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/321

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avait touché les fibres sensibles de son auditoire. On vit la jeune fille appuyer son front sur l’épaule d’Alcidus Noguer, mais personne ne soupçonna ce court dialogue échangé entre les deux personnages :

— Non, non, c’est trop horrible ! Jean, ayez pitié de moi. Ah ! mourir, mais démasquer le misérable !

— Vivre et venger ses victimes. Soyez forte, Stella. Je le veux. Votre père l’ordonne.

Seul peut-être dans la salle, Olivio crut avoir une vague intuition du sens de la scène.

Emporté par son improvisation, il venait d’imposer à la jeune fille une émotion trop violente, en ressuscitant en quelque sorte le drame effroyable de l’éruption. C’était une faute. Il se gourmanda, coupant court :

— Qu’ajouterai-je, señores ? Je crus ma fiancée engloutie. Je revins désespéré. Jugez de ma joie quand je la vis reparaître. Miraculeusement sauvée, elle venait, seule, orpheline, réclamer avec confiance mon appui, ma protection.

— Une prêtresse du temple Incatl accompagnait la señorita ?

— Cela est exact. Mais elle n’a daigné recevoir mon hospitalité que durant trois jours.

Olivio avait réponse à tout. Les juges se regardaient chuchotaient, approuvaient avec des haussements d’épaules significatifs. Évidemment ils se disaient :

— L’affaire est entendue.

Le gobernador, très inquiet au début de l’audience, s’était rasséréné à mesure que son frère parlait.

Ce fut en souriant qu’il se mit debout.

— Je rends grâces au ciel, Olivio, de ce qu’il a permis, que vous puissiez expliquer aussi nettement les événements. Une dernière formalité me reste à remplir. L’accusateur, que je ne vois pas en cette enceinte, s’était engagé ; à se présenter devant moi en temps utile. Je dois tenir compte de cette promesse.

Et enflant la voix, il appela :

— Señor Jean, dit Ça-Va-Bien.