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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/323

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Les juges avaient quitté leurs places. Ils entouraient Olivio, s’excusant des rigueurs de leurs fonctions, acceptant amicalement le dîner offert.

Dans le brouhaha, le boiteux Alcidus se trouva près de Candi. Il murmura :

— Toute la troupe est à l’hacienda ?

— Tutta la troupe, figlio.

— Tu te souviens de ce que tu as à faire ?

— Nous nous sommes partagés la besogne, le digne Crabb et moi.

— Bien, merci. Pour cette seule action de justice, le passé sera effacé.

Il se sépara brusquement de l’Italien et revenant auprès de Massiliague :

— Vous voudrez bien veiller à ce que ces hommes exécutent ponctuellement mes ordres.

— Eh ! oui, je m’arrangerai pour éviter d’être au repas.

Le faux Allemand n’en demanda pas davantage ; mais se rapprochant d’Olivio :

— Meinherr, le souvenir de ses malheurs a bouleversé votre chère fiancée. La señorita désire se retirer dans ses appartements.

Le Brésilien appuya la main sur son cœur, et de l’accent le plus tendre :

— Allez, allez, ma belle Stella. Je conçois tout ce que votre cœur filial a dû souffrir ; mais l’aurore du bonheur se lève. Remettez-vous de votre émotion pour que, ce soir, la joie brille en vos doux yeux. Absente ou présente, mon âme veillera autour de vous.

Et tandis que la jeune fille, chancelante au bras du boiteux, sortait, accompagnée par un murmure pitoyable, Scipion Massiliague profita de l’inattention générale pour se glisser auprès du maître de l’hacienda :

— Êtes-vous content de nous, mon bon ?

Olivio lui serra la main à la briser.

— Je vous suis obligé, à la vie, à la mort.

— Peuh ! cela n’en vaut pas la peine, je veux solliciter de vous une petite faveur, et nous serons quittes.