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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/360

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apprenant le drame du kiosque Rouge. Entendez le cri d’horreur avec lequel elle repoussa le verre d’Olivio, la haine qui lui fit crier la vérité sanglante ?

À mesure qu’il parlait, le gouverneur baissait la tête.

Certes, ces détails et d’autres encore le hantaient.

C’étaient eux qui assiégeaient sa rêverie à l’arrivée de l’ingénieur.

Mais vraiment, sur des indices aussi obscurs, on lui demandait trop, en essayant de le contraindre à devenir l’artisan de la honte de son frère.

Il se raidit contre ses doutes :

— Señor, dit-il froidement, le magistrat a épuisé ses ressources en votre faveur ; laissez-moi maintenant écouter la voix du frère. Les preuves que vous annoncez supposent d’abord la mise en liberté de la señorita Stella.

— C’est bien là, en effet ce que je réclame.

— La justice a prononcé.

— Vous avez le droit de grâce.

— Les populations me maudiraient, si j’en usais à l’égard de la complice d’un assassinat tel que celui du kiosque Rouge.

— Et vous l’enverrez à la garrotta ?

— Demain, à sept heures du matin.

Jean se redressa de toute sa hauteur. Une indomptable énergie se peignit sur son visage, et d’une voix tranchante :

— L’exécution n’aura pas lieu, señor.

— Vous dites ? s’exclama le gouverneur stupéfait du changement d’attitude du jeune homme.

— Elle n’aura pas lieu, parce que je ne le veux pas.

— Votre volonté, permettez-moi de vous le faire remarquer…

L’ingénieur l’interrompit violemment :

— Est tout. Vous le verrez. Je vous donnerai ainsi quelques heures de plus pour choisir entre le triomphe de la justice et la faillite de votre propre estime.

Pedro Avait froncé les sourcils :