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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/369

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Du coup, le magistrat, il se gratta l’oreille ; puis croyant avoir trouvé une échappatoire adroite :

— Vous êtes gardien des scellés ?

— Oui, mon bon… Monsou le Juge.

— Vous devez représenter les objets saisis à toute réquisition, sous peine de poursuites.

— C’est ce qui me navre, fanfarou.

— Eh bien, si vos meubles se promènent, accompagnez-les. Vous serez dans la situation d’un directeur d’établissement scolaire, conduisant ses élèves en excursion.

Et l’homme de loi éclata de rire, pensant avoir déconcerté son interlocuteur.

Il se trompait.

Malifousse rentra chez lui, notifia la décision du juge à son créancier. Celui-ci haussa les épaules et ne s’inquiéta pas davantage de mon cousin. Il enjoignit, seulement à l’huissier de presser les formalités, afin de pouvoir procéder, dans le plus bref délai, à la vente, par autorité de justice, du mobilier du pauvre spirite.

Jugement, apposition d’affiches annonçant la mise aux enchères, rien ne fut épargné.

Le jour de l’exécution arriva.

Savourant déjà sa vengeance, le créancier intraitable, le commissaire-priseur, ses employés, les acheteurs de la bande noire, tous ceux en un mot qui s’enrichissent de la misère des autres, se trouvaient rassemblés. 

Les quolibets, les plaisanteries barbares pleuvaient sur Malifousse qui, très calme, se tenait au milieu des gens accourus à la curée.

Chose bizarre, mon cousin souriait. Ses petits yeux, il avait des petits yeux gris, le bon garçon, ses yeux lançaient des éclairs. On eût dit qu’il se tenait à quatre pour ne pas s’esclaffer.

Et comme le commissaire-priseur disait :

— Mesdames, messieurs, nous allons procéder.

Un fait inoubliable se produisit, eh donc !

La porte de la maison s’ouvrit rascasse ; les meubles sortirent, tout seuls, possédés par la force magnétique ou spirite.