Aller au contenu

Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

priétaire ; mon cousin, les regardant, affalés dans la poudre du chemin, enfourcha triomphalement un pouf moelleux, caparaçonné de pourpre et, enlevant son bizarre escadron, l’entraîna en un galop infernal jusqu’aux confins de l’horizon, derrière lequel il disparut aux yeux éblouis de ses ennemis.

On était proche de Brest.

Malifousse s’y installa, au milieu de ses meubles féaux. Voilà pourquoi mon cousin n’est pas défunt à Marseille ; pourquoi les jeunes Marseillais ignorent Malifousse.

Tout en se livrant aux excentricités de son imagination, Scipion promenait autour de lui des regards scrutateurs.

Il vit Francis prendre place près de la porte séparative du contrôle et de la salle. Il distingua son engagé Pierre s’installant à côté de la « communication » reliant la salle aux coulisses.

Sans doute, son bavardage avait pour but d’accaparer l’attention du gouverneur et d’Olivio, car Alcidus Noguer put échanger quelques signes incompréhensibles avec les Chasseurs canadiens.

Le rideau se leva.

Des artistes bizarres, écume des théâtres de l’Europe ou de l’Amérique du Nord, figurants auxquels l’esprit aventureux, l’inconscience de l’ignorance, donnaient l’audace de jouer la comédie, interprétèrent le premier acte d’une œuvre locale, l’Oro do Amazonas (l’Or de l’Amazonas).

La toile se baissa de nouveau.

Déjà les spectateurs se levaient, prêts à sortir durant l’entr’acte, quand se produisit un incident inattendu.

Le rideau fut brusquement écarté ; une femme se glissa entre lui et le manteau d’arlequin ; elle s’avança jusqu’au trou du souffleur, montrant à tous son visage d’une merveilleuse beauté, illuminé par le rayonnement de ses yeux noirs.

À sa vue, Olivio frissonna :

— La señorita Ydna ? fit-il comme malgré lui.

Son frère le regarda :

— Vous connaissez cette femme, Olivio ?