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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/384

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Au seul nom de la Vierge, tous les hommes se découvrirent.

Quant à la femme, domptée, mais non satisfaite, elle courba la tête en grommelant :

— Oui, oui, la Madone tolère parfois d’étranges choses. Il ne m’appartient pas, à moi qui suis sa servante, de discuter ses volontés. Mais je brûlerais certainement un cierge, si sa protection toute-puissante, s’étendait sur celle qui va mourir, si la Dame du Ciel tient sa promesse du théâtre.

— Vous y étiez ? interrogèrent les voisins avec une avide curiosité.

Un sourire énigmatique entr’ouvrit les lèvres de la femme. Puis elle répliqua :

— Oui.

— Et le miracle a été annoncé ?

— La Virgen de la Independancia a affirmé que la garrotta se refuserait à étrangler l’innocente.

Mais la conversation dut s’arrêter.

Un grand remous se produisait parmi la foule.

C’était l’exécuteur, qui venait prendre livraison de sa terrible machine, et sur un signe de qui un coureur, aposté à l’entrée de la caes dos Soldados, galoperait jusqu’à la prison, afin d’ordonner que l’on amenât la condamnée.

Le bourreau, vêtu de la veste noire, de la culotte de même étoffe, de bas noirs, sur lesquels s’enroulaient les lacets rouge feu de ses sandales, portait sur l’épaule la capa (manteau) rouge, semée de larmes d’argent.

Sa figure sombre et maigre, son aspect terrifiant, fit passer un murmure d’effroi dans la cohue.

Lentement il s’avança. Sur son chemin, tous s’écartaient avec horreur. En passant sous la fenêtre d’Olivio, il adressa à l’haciendero et au gouverneur Pedro un salut respectueux.

Un silence de mort s’était établi sur la place.

Spectateurs rassemblés autour de l’échafaud, ou curieux pressés aux fenêtres, tous semblaient hypnotisés par la vue du sinistre personnage.

On suivait avec une attention inquiète ses moindres mouvements.