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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/402

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adoucissements, compatibles avec la stricte observation des lois, je suis venu, señorita, pour savoir si vous ne souhaiteriez pas quelques mets spéciaux, que je substituerais à l’ordinaire de la maison.

Et, persuasif :

— Une petite gourmandise avant… de s’embarquer pour un long voyage ; cela soutient, cela donne du courage. Enfin, le nombre des satisfactions, sur cette terre, est limité. On ne regrette jamais de s’en être procuré une de plus.

Il se tut. Doucement, sa prisonnière secouait la tête.

— Je vous remercie de l’intention, señor, mais je ne désire rien de semblable.

— Réfléchissez.

— Depuis ce matin, toutes mes réflexions sont faites señor. Je vous suis du reste aussi obligée de vos bonnes intentions que si j’en profitais.

— Vous êtes une charmante personne, que j’aurais joie à obliger, dans la mesure de mes moyens, s’entend. Vous refusez, je m’incline devant votre décision, et je me retire, avec la conviction qu’aucun de mes collègues n’aurait pu agir plus délicatement.

Sur ce, le gracieux fonctionnaire salua sa captive, avec un rond de jambe qui n’eût point été déplacé à la cour.

La porte se referma sur lui.

Stella se plongea de nouveau dans le rêve. Seulement sa tournure d’esprit avait changé.

Elle voyait plus sombre à présent. Tout à l’heure, elle se croyait sauvée ; maintenant, elle savait que son supplice était simplement différé de quelques heures.

L’espoir, prêt à prendre son vol, avait replié ses ailes.

— Oh ! il est seul, seul contre tous. Il ne saurait vaincre.

Des larmes montèrent aux yeux de Stella qui acheva :

— Sa tendresse pour moi le conduira seulement à partager mon sort. Oh ! mon père, mon bon père, vais-je donc succomber sous les coups des méchants ?