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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/422

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— Le blockhaus !

— Hein ?

— Oui ; l’odeur de pétrole, souvenez-vous. Nos amis sont emprisonnés par l’incendie.

Ces mots terrifiants leur donnent des ailes.

Tous deux reviennent de toute la vitesse de leurs jambes vers l’abri. Ils contournent le taillis qui leur masque la vue du blockhaus.

Francis ne s’est pas trompé.

Alimentées par l’huile de naphte, les flammes fuligineuses lèchent tout le pourtour de l’habitation, la toiture brûle avec des crépitements. Des cris d’angoisse se font entendre.

Ce sont leurs amis qui, prisonniers d’un cercle embrasé, lancent vers le ciel la dernière plainte de ceux qu’enlace déjà la mort.

Gairon, Masslliague précipitent leur allure. Les voici devant le blockhaus. Leurs appels répondent à ceux de leurs compagnons.

Ils essaient d’atteindre la porte. Impossible. Flamme et fumée les repoussent, à demi asphyxiés, les vêtements roussis.

Mais Scipion s’administre un violent coup sur la tête :

— Té, je suis bête comme un limaçon du Nord.

Francis le considère. Dans l’exclamation du Marseillais, il a entrevu un espoir.

— Eh oui, ma caille, j’ai les ampoules ; je vais le geler, leur feu. Ôte-toi de là, pitchoun, que j’opère !

C’est compris. Gairon s’écarte vivement, et le Provençal, extrayant une ampoule du bissac dont il s’est chargé au départ, la projette avec force contre la porte embrasée.

Il y a un éclaboussement, une gerbe d’étincelles d’or, un souffle glacé, devant lequel la flamme semble s’écarter, reculer. Le pétrole s’est gelé, est devenu solide.

Sans perdre une seconde, les deux hommes bondissent, renversent d’un coup d’épaule, la porte à demi consumée, et entraînent leurs amis, leurs chevaux, au dehors.