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Page:Ivoi - Les Semeurs de glace.djvu/43

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Non, c’est un être merveilleusement doué pour le mal. Voilà tout.

Sa main décrivit un cercle autour d’elle.

— Vous pouvez vous en rendre compte.

Mais, changeant de ton :

— Aidez-moi à me relever. Mes forces me trahissent, et pourtant je veux aller m’agenouiller là-bas, sur cette éminence qui recouvre tout ce que j’ai aimé.

Jean la souleva doucement.

— Merci. Vous m’avez parlé de vengeance. Vous avez jeté dans mon âme le ferment des filiales colères ; accompagnez-moi. Auprès de la tombe où le volcan a emprisonné mon père, je vous dirai tout.

Puis, avec un navrant sourire :

— Quand vous connaîtrez Olivio, vous verrez si, comme vous me le proposiez généreusement tout a l’heure, vous consentez encore à embrasser la cause de l’orpheline, à engager une lutte où l’espérance de la victoire même semble interdite.

Elle était debout.

Jean mit un genou en terre.

— Alors comme à présent, je me dévouerai à la tâche que vous allez entreprendre.

— Attendez avant de vous engager !

Mais il secoua la tête :

— Mademoiselle, si vous vivez, si vous souffrez, c’est à moi qu’en appartient toute la responsabilité.

— Merci de ce que vous avez fait.

— Je ne mérite pas de remerciements. Moins bonne, vous me haïriez. Mon zèle n’a abouti qu’à vous désespérer. Eh bien ! lorsque nous étions seuls dans la retraite que le hasard nous avait ménagé, tandis que vous dormiez encore, je me suis jugé. L’homme, être faible, ne peut malheureusement revenir en arrière, modifier ce qui fut le passé. L’avenir qui m’appartient, l’avenir qui me sera mesuré par le destin, est à vous. Ce n’est pas dévouement, ni générosité, ni noblesse, c’est simple probité commerciale ; c’est