Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/132

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Le Marseillais le considéra :

— Voilà ce qui m’a obligé d’aller aux abattoirs de Chicago, d’acheter des planchettes pour justifier les scies.

Et avec un sourire :

— Ces jeunes filles se figurent une je vais leur découper des constructions de bois reproduisant le Stock-Yard.

Il ouvrit la fenêtre avec précaution.

Au dehors, les foyers électriques projetaient sur l’avenue une clarté presque aussi intense que la lumière du jour.

Des tramways passaient de temps à autre, avec des tintements assourdissants de timbres, mais les piétons étaient déjà rares.

Aurora, en dépit de ses larges rues, des nombreuses voies ferrées qui s’y croisent, reste la cité provinciale, où on se lève matin, où l’on se couche tôt.

— Marchons, reprit Massiliague. Les passants ne me gêneront guère, et les tramways couvriront le grincement de la lime.

Et tranquillement il attaqua le premier barreau.

Tout le monde connaît aujourd’hui ces scies américaines, si fragiles d’apparence, auxquelles rien ne résiste en réalité.

Celle dont se servait le Français s’enfonçait rapidement dans le fer en produisant un bruit léger, à peine perceptible pour l’opérateur lui-même.

En un instant, la barre métallique fut coupée.

Scipion eut une exclamation :

— Pécaïre… ça ne traîne pas.

Il regarda sa montre :

— Mâtin ! mon bon, à ce train-là, tu aurais le temps de scier toute la maison avant de la quitter.

Puis il se remit à l’ouvrage.

À neuf heures trente-cinq, deux barreaux étaient enlevés. Aucun obstacle matériel ne s’opposait plus à l’évasion du captif.

— Maintenant, attendons, reprit Massiliague. Je vais laisser un mot à mes hôtes. Il faut de la politesse, même quand on file… à la marseillaise.

Sa croisée refermée avec soin, les rideaux tirés, il alluma sa lampe, s’installa devant sa table et confectionna la lettre suivante :