Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/231

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toute apparence, si elle aboutissait au plateau, si elle ne permettrait pas de nous surprendre.

— Avons-nous cela à craindre ?

— Non, doña. Le rebord dont je parle finit brusquement… C’est une impasse. Bref ! je laissai le Comanche poursuivre sa reconnaissance, et quand il fut tout près de moi, je l’abattis d’un coup de carabine. Son corps est à présent dans le lac. Seulement une idée m’était venue.

— Une idée ?

— La corniche ne peut pas servir à monter jusqu’à nous, mais un homme résolu pourrait l’utiliser pour tromper la vigilance des assiégeants, gagner la prairie et aller chercher du secours.

Dolorès joignit les mains :

— Oui, oui, auprès des Séminoles de la rivière Canadienne. Les Séminoles sont les alliés séculaires des Atzecs.

Mais Gairon l’interrompit brusquement.

— Ils sont surtout, eux, plus intelligents, plus humains, plus civilisés, les ennemis des bandits du désert, Apaches ou Comanches.

Puis, après un silence :

— La nuit prochaine, je tenterai l’aventure.

La jeune fille lui serra la main, mais d’une voix hésitante :

— Ne pourrions-nous pas tous fuir par la voie que vous indiquez ?

— Non. Ce serait vous livrer à vos adversaires.

— Me livrer ?

— Évidemment. Nous n’avons plus de chevaux, donc notre marche serait lente, et les assiégeants bientôt avertis de l’abandon du campement, nous rejoindraient en plaine.

Elle inclina la tête :

— Vous avez raison, mon ami. Nous vous attendrons ici.

Et, avec une expansion soudaine :

— Si vous échappez à ceux qui nous entourent, marchez sans vous arrêter une minute, la cause de l’indépendance n’a plus d’espoir qu’en vous.

— Je passerai ou je mourrai, répondit Francis simplement.

Il allait s’éloigner, mais se ravisant :

— Ne dites rien de cela à nos amis, doña. La curiosité les pousserait vers le bord de la falaise.