Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/244

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secouer le joug ; votre tendresse doit aller seulement à ceux qui peuvent vous seconder dans cette entreprise.

Les yeux baissés, le Vautour Rouge et le Bison écoutaient.

Maintenant, ils ne doutaient plus. Cœur de Feu venait leur reprocher de combattre Dolorès Pacheco.

— Eh bien ! Quels sont vos actes ?

— Oui, quels sont-ils ?

— Vous assiégez étroitement la Vierge du Sud, fille inspirée par le Grand Esprit, qui tente de délivrer vos frères et vous-mêmes. Qui vous pousse à cela ? Vos propres ennemis, ceux qui vous ont arraché vos territoires de chasse, qui vous ont chassés de vos villages, ceux dont l’avidité ne s’est arrêtée qu’aux frontières du désert, non qu’elle fût rassasiée, mais parce que, là, elle ne voyait plus rien à prendre.

Les chefs restèrent muets, impressionnés par les brûlantes paroles du messager.

— Alors les Séminoles assemblés ont dit : Nos frères rouges se trompent. Sans nul doute les mauvais génies se sont plu à obscurcir leur raison. Et ils m’ont choisi pour venir vous faire entendre la vérité.

Tandis que le Séminole parlait, le Vautour Rouge réfléchissait. Un conseil de la puissante nation séminole était un ordre. Il fallait obéir, sous peine de déchaîner la guerre et d’amener l’anéantissement des derniers survivants des tribus apaches et comanches. Les Papagos, les Utapis, il en était certain, ne résisteraient pas une minute à la volonté dont Cœur de Feu apportait l’expression.

Et, avec la diplomatie de sa race, le Comanche contraignit son visage à sourire.

— Il me semble, en effet, que mes yeux se dessillent, que des bruits nouveaux parviennent à mes oreilles. Parle encore, mon fils, dis toute ta pensée. Sois le médecin de l’esprit du vieux chef.

Cœur de Feu sourit à son tour. Il sentait que sa négociation allait aboutir heureusement.

— Mon père, dit-il, n’est-il pas surpris d’avoir rassemblé des guerriers pour s’opposer au passage de la Vierge du Sud ?

— Si, si… en effet… Comment ai-je pu faire cela ?

— Trompé par les mauvais Esprits, certainement. Mais à présent que mon père voit, que lui suggère sa pensée ?