Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/387

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me revoir pourrait leur faire du mal. Il faudra donc qu’elles n’aperçoivent ni moi, ni mes compagnons,

— Facile, señor.

— D’autre part, cette nervosité, dont je te parle, est cause que le sommeil les fuit. Or, des nuits sans repos après des journées de marche, rien n’est aussi pernicieux pour la santé.

— Votre Seigneurie exprime une grande vérité.

— Or, je m’intéresse à elles et ne veux point qu’elles soufflent de la fatigue. Tu mêleras le contenu de ce flacon à leur boisson.

— Et elles dormiront.

— Ce que je souhaite.

Le tambero avança la main.

— Donnez le flacon, señor. Il sera fait comme vous l’ordonnez.

L’inconnu enveloppa le cabaretier d’un regard scrutateur, puis, résolument :

— Prends-le donc… prends aussi ces cinquante dollars, je te compterai le surplus quand tu viendras m’annoncer que tes hôtes sont endormis.

Il se leva et avec une insouciance parfaitement jouée :

— À propos, ils ne doivent pas se douter de ta petite préparation.

— Ils n’y verront rien. Votre Seigneurie peut être tranquille sur ce point.

— Tu comprends. S’ils apprenaient que je veille sur eux, peut-être seraient-ils froissés dans leur amour-propre de cavaliers.

Gonfaccio cligna des yeux :

— Oui, oui, señor, je comprends. Entre nous, vous ne pouviez placer en meilleures mains vos cent dollars.

À ce moment, les cinq hommes qui étaient arrivés dans l’auberge à la suite du personnage mystérieux, parurent à l’entrée de la salle commune.

— Les chevaux sont au râtelier, avec de la paille jusqu’au ventre, dit celui qui, tout à l’heure, avait tenu l’étrier.

— Où vas-tu nous cacher ? demanda celui auquel s’adressaient ces paroles, en se tournant vers le tambero.

— Dans ma propre chambre, señor.

— Parfait, conduis-nous. Et, surtout, sois discret.