Page:Ivoi - Massiliague de Marseille.djvu/57

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— Vous voulez rire, monsieur Sullivan.

— Moi… Pourquoi supposez-vous cela, my old fellow (mon vieux garçon) ?

— Dame ! Il me paraît étrange que, l’ayant rencontré, vous l’ayez laissé passer, à moins que son escorte ne fût nombreuse.

— Deux Indiens Mayos formaient toute sa suite.

— Alors je ne comprends pas.

— Simple pourtant. Les combinaisons politiques ne paraissent pas vous être familières.

Francis ne répondit pas :

— Souvenez-vous donc que nous sommes ici en territoire mexicain ; un enlèvement à main armée entraînerait des complications diplomatiques… Le « champion » — Sullivan prononça ce mot avec une ironie mordante — le champion se serait défendu. Coups de revolver, bruit, l’hacienda mise en émoi ; au lieu de cela…

— Au lieu de cela ? interrogea curieusement le chasseur.

— J’ai abordé le señor Massiliague avec politesse, continua Joë. Il m’a reconnu.

« — Señor, lui ai-je dit, à Aguascalientes, vous m’avez blessé en combat loyal. Il m’est impossible de rester sur une défaite. Je réclame de vous une revanche.

— Hein ?

— J’étais sûr de l’effet. À votre service, répliqua ce niais ; quand vous plaît-il d’en découdre ?

— Demain au point du jour, avant que les serviteurs de l’hacienda de San Vicente soient répandus dans la campagne. Il s’esclaffa : — Vous aimez le mystère ? — Je crains d’être dérangé, voilà tout.

— Eh bien, consentit le faquin, c’est entendu.

— Et surtout silence, recommandai-je, les chasseurs qui m’ont servi de guides, seront les témoins…

— N’ayez crainte, la langue de Massiliague s’agite beaucoup, mais elle ne divulgue jamais un secret. Sur ce, nous nous saluâmes courtoisement. À l’aube, le gachupino viendra seul, sans défiance à la lisière du bois qui nous abrite… Quand on s’apercevra de sa disparition, j’aurai franchi le Rio Bravo del Norte et je galoperai sur le sol libre des États-Unis.

Mais s’interrompant soudain, le Yankee fit un signe aux hommes de son escorte.

Ceux-ci, des soldats réquisitionnés au fort frontière